Avertissement : à travers les "Humani-Story", nous vous proposons de découvrir des souvenirs de mission de travailleurs humanitaires. Les faits relatés sont des histoires vécues et nous vous informons que certains passages peuvent perturber les lecteurs les plus sensibles. Merci de votre attention.
Warning: through the "Humani-Story" series, you will discover memories of humanitarian workers' missions. The stories are based on true experiences and we inform you that some passages may disturb the most sensitive readers. Thanks for your attention.
English version below | Hommage en fin de page
LE CONFLIT AFGHAN
En octobre 1982, deux semaines après mon retour de Thaïlande, le CICR [1] a insisté pour que je parte au plus vite sur la frontière pakistano-afghane. En me proposant de prolonger de six mois mon contrat, on m'a promis que ma famille pourrait me rejoindre vers la fin de l'année. J'ai appris la nouvelle à Marie et lui ai dit que je me réjouissais à l'idée que nous nous retrouverions bientôt là-bas.
À Peshawar, je devais coordonner les actions médicales du CICR à la frontière de l'Afghanistan. Les troupes de l'URSS, comme on appelait alors cette superpuissance, soutenait le gouvernement de Kaboul et faisait la guerre aux rebelles afghans qui désiraient libérer le pays de l'envahisseur soviétique. Cependant, nous n'avions pas reçu la permission du gouvernement central de Kaboul de travailler dans ce pays. Le CICR s'était donc établi au Pakistan et avait ouvert un hôpital de 120 lits à Peshawar, puis un second, de 60 lits, à Quetta, dans la province du Baloutchistan. Nous y traiterions les blessés de guerre afghans. De plus, nous avions constitué un centre pour paraplégiques et un centre de prothèses pour les personnes amputées, fort nombreuses dans ce type de conflit.
Chaque hôpital du CICR employait du personnel afghan et pakistanais ainsi que des expatriés. Une infirmière-chef les dirigeait, soutenue dans ses tâches par deux ou trois infirmières du CICR. Des équipes composées de chirurgiens, d’anesthésistes et d’infirmières instrumentistes, envoyées par diverses sociétés nationales de la Croix-Rouge, travaillaient dans ces établissements. On les remplaçait tous les trois mois.
Très vite, tous ces établissements ont été remplis de blessés de guerre provenant des provinces limitrophes ou les affrontements étaient nombreux. Le relief montagneux du pays et le transport qui s'effectuait le plus souvent à pied et durait plusieurs jours, amoindrissaient les chances de survie des blessés. Ceux-ci arrivaient le plus souvent à dos d'homme et plusieurs ne survivaient pas au voyage ou arrivaient dans un état aggravé en raison du temps écoulé depuis qu'ils avaient subi leurs blessures. Les amputations étaient très nombreuses et beaucoup plus mutilantes qu'elles ne l'auraient été si les évacuations avaient été plus efficaces.
De très nombreux enfants nous arrivaient victimes des mines antipersonnel qui, à la suite du passage des avions ennemis, jonchaient le sol de certains villages des vallées reculées. Ces mines ressemblaient à des jouets et explosaient dans les mains des enfants qui se ruaient pour les ramasser. Le résultat était instantané : mains ou avant-bras arrachés ou disloqués par le souffle de la mine. Trop souvent, les blessures infectées ainsi que l'état de fatigue, et les carences nutritionnelles des petits blessés ne leur permettaient pas de survivre. Désespérés par les souffrances de leurs enfants, les parents ou les membres de la famille étaient bien sûr révoltés par la sauvagerie de ce que la guerre leur imposait.
Dans la chirurgie de guerre, je l'ai dit, les amputations sont fréquentes. Bien souvent, ce sont les seuls actes chirurgicaux qui permettent à une victime de survivre à ses blessures. Provenant de pays où ce type d'opération est rarement nécessaire, les équipes sur le terrain avaient souvent du mal à s'y résoudre. Cela entraînait parfois de vives tensions entre les chirurgiens et moi-même, désireux que nous étions de faire notre travail le plus efficacement et humainement possible, selon nos expériences respectives. Nous étions tous infiniment touchés par ce que nous voyions et révoltés par la barbarie et l'ignominie des moyens employés. Comment pouvait-on oser s'en prendre à des enfants pour miner la résistance de la population ? Mais que pouvions-nous faire, sinon accomplir notre tâche de notre mieux, en mettant nos sentiments de côté ? Bien évidemment, nous en discutions entre nous, mais la pudeur de chacun ne permettait pas une vraie expression de la colère et de la tristesse. Moi-même, bien qu'étant à la tête de cette action médicale, je ne partageais mes émotions avec personne ; je les gardais enfermées à double tour en moi, comme j'en avais pris l'habitude.
Un jour, à Quetta, une des équipes chirurgicales s'est résolue à amputer un blessé afghan au niveau de l'épaule droite. Des éclats d'obus lui avaient emporté l'avant-bras et la gangrène menaçait. N'ayant jamais pratiqué cette difficile opération, le professeur de chirurgie et son collègue m'ont appelé à la rescousse. Non sans peur, j'ai acquiescé à leur demande en raison de l'urgence. Cela faisait 18 mois que je n’opérais plus et j'avais quelques doutes quant à ma capacité de m'y remettre et d'être performant.
Nous avons fait ensemble cette intervention chirurgicale. Vivre ces instants a été à la fois une joie, une grande fierté, mais aussi une sorte de supplice, car je savais que cette opération serait pour moi la dernière. En effet, je n'ai plus jamais opéré depuis. L'intervention fut une réussite sur le plan chirurgical. Notre patient avait tout de même perdu un bras et nous nous sommes bien gardés de manifester notre satisfaction. Il était bien sûr heureux d'être toujours vivant, mais nous savions que le plus dur commençait pour cet homme. Il lui fallait réapprendre à vivre, apprivoiser son nouvel état et retrouver une certaine autonomie.
Le regard d'un blessé qui se découvre amputé d'un membre est souvent plein d'incompréhension. Celui-ci sait bien, avant l'opération, que sa main (par exemple) est en très mauvais état, mais il ne peut s'imaginer que nous devrons pratiquer impérativement l'amputation dans les tissus sains, à la hauteur de l'avant-bras. Ces blessés souffrent très fréquemment de « douleurs fantômes » dans les membres disparus, sans comprendre ce qui leur arrive. Les explications des médecins ou des infirmiers peuvent les aider, mais une certaine méfiance subsiste fréquemment dans leur regard ou leur attitude.
Opérer dans de telles conditions est extrêmement exigeant sur le plan émotif. Un jour, après avoir amputé plusieurs enfants, un des chirurgiens est sorti de la salle d'opération en criant qu'il voulait une kalachnikov pour aller « buter tous ces salauds de Soviétiques ». Cette réaction, tout à fait compréhensible dans les circonstances, ne pouvait être tolérée devant le personnel afghan et les familles des blessés, car elle entachait la neutralité dont devait faire preuve le CICR. Lorsque cet incident lui a été rapporté, le chef de délégation m'a demandé d'intervenir afin de calmer le chirurgien. Je lui ai donc expliqué les raisons pour lesquelles il ne pouvait réagir ainsi, tout en lui disant que je comprenais parfaitement le fond de sa pensée et même que je l’approuvais. Cela n'a fait qu'attiser sa colère. On lui a proposé de prendre quelques jours de vacances, même si cela surchargeait l’autre chirurgien, mais il a refusé, sans décolérer. Il était véritablement à bout de nerfs et j'ai pris la décision de le renvoyer à Genève. Nous ne pouvions le garder avec nous dans cet état et n'avions pas les structures pour nous occuper de lui.
Cet épisode illustre bien ce que devait affronter le personnel médical et infirmier, sans préparation psychologique aucune. Avant de quitter son pays, nul n'avait eu de briefing au sujet de la situation et du travail qui l'attendait au Pakistan. Dès leur arrivée, médecins et infirmiers étaient brutalement plongés dans la réalité : blessures à traiter selon les principes de la chirurgie de guerre ; moyens chirurgicaux limités par rapport à ce qu'ils connaissaient ; aucune structure de soins intensifs ; salles d'opération rudimentaires ; matériel basique ; etc. De plus, la communication avec les patients ne pouvait se faire qu'avec l'aide d'un traducteur.
Il n'était donc pas rare qu'un membre d'une équipe décompense. Si, après une courte période d'essai de stabilisation, son état ne s'améliorait pas, la seule chose que nous pouvions faire était de le retourner dans son pays. Ce que nous appelions à l'époque la « décompensation » recouvrait en réalité des signes importants qu'on pourrait de nos jours interpréter comme des symptômes du TSPT [2]. La colère de ce chirurgien, ainsi que son expression, était une émotion naturelle. Sa manière de l'évacuer était toutefois inadéquate dans les circonstances. En outre, comme il n'allait pas mieux après deux jours passés au calme et qu'il se sentait toujours tendu à l'extrême, nous craignions que ne surviennent d'autres crises de rage et que l'homme ne soit sur le point d'exploser où d'imploser à nouveau, ce qui aurait mis en péril l'action du CICR, sa vie, et celle de ses collègues.
Qu’advenait-il ensuite de cette personne ? On ne faisait rien pour l'aider, puisque le TSPT était fort mal connu à l'époque. Elle se reprochait probablement de n'avoir pas su affronter la situation et d'avoir déshonoré les couleurs de la société nationale de la Croix-Rouge qui l'avait recrutée. Dure réalité ! Mais y avait-il une autre solution que l'éloignement ? Devais-je courir le risque que cette personne décompense encore plus et mettent tout le monde en danger ? N'était-il pas préférable de la déplacer dans un milieu plus rassurant, en espérant que cela l'aiderait à récupérer ? Le choix était simple, en théorie, mais chaque fois que je devais m'y résoudre je souffrais de « remettre à disposition de Genève » la personne en question.
Le centre de prothèse était situé à Peshawar, au Pakistan, et abritait une vingtaine d’amputés qui attendaient leur tour. Selon la philosophie des dirigeants du centre, le matériel de base devait être disponible dans le pays, sinon il serait impossible de réparer sur place les prothèses sophistiquées et importées d'Occident. Pour ce faire, il aurait fallu les renvoyer en Europe, ce qui était impensable. Il fallait donc fabriquer sur place des prothèses rudimentaires mais robustes, adaptées au relief montagneux de l'Afghanistan.
Les techniciens du CICR s'y employaient et formaient en même temps des Afghans à ce travail. Les physiothérapeutes prenaient en charge les patients afin de leur apprendre à se mouvoir avec leurs prothèses. Les blessés passaient un mois au centre, puis retournaient dans leur village. J'éprouvais une certaine satisfaction à me rendre dans ce centre, car j'avais l'impression qu'une belle action était faite pour les blessés que nous avions opérés. Quant aux Afghans, ils semblaient accepter leur sort, reconnaissants envers nous des soins qu'ils recevaient, et heureux d'être toujours vivants et de marcher de nouveau, heureux que nous les aidions à vivre malgré leur handicap. Certains voulaient retourner dans leur village et reprendre le combat, d'autres souhaitaient rester au centre le plus longtemps possible.
En tant que chirurgien ayant pratiqué de nombreuses amputations, je ne pouvais toutefois m'empêcher d'éprouver un certain malaise teinté de culpabilité. Je dissimulais ce que j'éprouvais sous un air détaché. Je faisais le clown et plaisantais à propos des événements que nous vivions chaque jour. J’étais le coordinateur des équipes chirurgicales, de tout le personnel expatrié paramédical et des employés locaux travaillant dans les hôpitaux, et il était de mon devoir de mettre de l'ambiance pour aider les gens à tenir le coup et à travailler sans désemparer, dans des conditions difficiles. Il était important que le sérieux de notre travail ne nous envahisse pas trop, alors je faisais preuve d'un certain cynisme. Un observateur extérieur aurait pu croire que rien ne me touchait.
Dr. Daniel Dufour – « J’ai failli y laisser mon âme » : pages 105 à 111.
[1] CICR : Comité international de la Croix-Rouge
[2] TSPT : Trouble de stress post-traumatique
********************
THE AFGHAN CONFLICT
In October 1982, two weeks after my return from Thailand, the ICRC [1] insisted that I leave for the Pakistan-Afghanistan border as soon as possible. I was offered a six-month extension to my contract and was promised that my family would be able to join me by the end of the year. I told Marie the news and said that I was looking forward to meeting up with them soon.
In Peshawar, I had to coordinate the ICRC's medical activities on the border with Afghanistan. The troops of the USSR, as this superpower was then called, were supporting the government in Kabul and waging war on the Afghan rebels who wanted to liberate the country from the Soviet invaders. However, we did not receive permission from the central government in Kabul to work in that country. So, the ICRC moved to Pakistan and opened a 120-bed hospital in Peshawar and a second 60-bed hospital in Quetta, in Balochistan province. We would treat Afghan war wounded there. In addition, we had set up a centre for paraplegics and a prosthetic centre for amputees, of whom there are many in this type of conflict.
Each ICRC hospital employed Afghan and Pakistani staff as well as expatriates. A head nurse led them, supported by two or three ICRC nurses. Teams of surgeons, anesthetists and operating theatre nurses, sent by various national Red Cross societies, worked in these facilities. They were replaced every three months.
Very quickly, all these establishments were filled with war wounded coming from neighbouring provinces where there were many clashes. The mountainous terrain of the country and the transport, which was usually done on foot and lasted several days, reduced the chances of survival of the wounded. They usually arrived carried on the backs of men and many did not survive the journey or arrived in a worsened condition due to the time that had elapsed since they had sustained their injuries. Amputations were very numerous and much more mutilating than they would have been had the evacuations been more efficient.
A great many children came to us as victims of the anti-personnel mines which, following the passage of enemy aircraft, littered the ground of some villages in remote valleys. These mines looked like toys and exploded in the hands of the children who rushed to pick them up. The result was instantaneous: hands or forearms torn off or dislocated by the blast of the mine. All too often, the infected wounds, as well as the state of fatigue and nutritional deficiencies of the wounded children, did not allow them to survive. Desperate from seeing their children suffer, the parents or family members were of course appalled at the savagery of what the war was imposing on them.
In war surgery, as I said, amputations are common. Often, they are the only surgical procedures that allow a casualty to survive their injuries. Coming from countries where this type of operation is rarely needed, the teams on the ground often found it difficult to come to terms with this. This sometimes led to great tension between the surgeons and myself, as we wanted to do our work as efficiently and humanely as possible, based on our respective experiences. We were all deeply affected by what we saw and revolted by the barbarity and ignominy of the means used. How could anyone dare to attack children to undermine the resistance of the population? But what could we do, except to do our task as best we could, putting our feelings aside? Of course, we discussed it among ourselves, but the modesty of each one did not allow a true expression of anger and sadness. I myself, although I was in charge of this medical programme, did not share my emotions with anyone; I kept them locked up inside me, as I had become used to.
One day in Quetta, one of the surgical teams decided to amputate the right shoulder of a wounded Afghan. Shrapnel had removed his forearm and gangrene was threatening. Having never performed such a difficult operation, the professor of surgery and his colleague called me to the rescue. Not without fear, I agreed to their request because of the urgency. It had been 18 months since I had last operated, and I had some doubts about my ability to get back into it and perform well.
We did the surgery together. It was a joy, a great pride, but also a kind of torture, because I knew that this operation would be my last one. Indeed, I have never operated again since. The operation was a surgical success. Our patient had lost an arm and we were careful not to show our satisfaction. Of course he was happy to be alive, but we knew that the hardest part of his life was beginning. He had to learn how to live again, how to cope with his new condition and how to regain some independence.
The look in the eyes of a wounded person who discovers that he has lost a limb is often full of incomprehension. He knows that his hand (for example) is in a very bad condition, but he cannot imagine that we will have to perform the amputation in the healthy tissue at the level of the forearm. These injured people very frequently suffer from "phantom pains" in the missing limbs, without understanding what is happening to them. The explanations of the doctors or nurses can help them, but a certain distrust often remains in their eyes or attitude.
Operating under such conditions is extremely emotionally demanding. Once, after amputating several children, one of the surgeons came out of the operating room shouting that he wanted a Kalashnikov to go and "shoot all those Soviet bastards". This reaction, understandable in the circumstances, could not be tolerated in front of the Afghan staff and the families of the wounded, as it undermined the neutrality the ICRC was supposed to show. When this incident was reported to him, the head of delegation asked me to intervene to calm the surgeon down. I explained to him why he could not react in this way, while telling him that I fully understood and even approved of his thinking. This only fueled his anger. We offered him a few days off, even if it meant overloading the other surgeon, but he refused, without giving up. He was really at the end of his tether and I decided to send him back to Geneva. We couldn't keep him with us in this state and we didn't have the structures to take care of him.
This episode illustrates what medical and nursing staff had to face, without any psychological preparation. Before leaving their country, no one had been briefed about the situation and the work that awaited them in Pakistan. As soon as they arrived, the doctors and nurses were brutally plunged into reality: wounds to be treated according to the principles of war surgery; limited surgical means compared to what they knew; no intensive care structure; rudimentary operating rooms; basic equipment; etc. Moreover, communication with the patients could only be done with the help of an interpreter.
So it was not uncommon for a team member to lose their composure. If, after a short period of trying to calm them, they didn't get better, the only thing we could do was send them home. What we called "decompensation" at the time was in fact significant signs that could be interpreted today as symptoms of PTSD [2]. This surgeon's anger, and its expression, was a natural emotion. However, his way of venting it was inappropriate under the circumstances. Moreover, as he was not better after two days of relaxation and was still feeling extremely tense, we feared that further outbursts of rage would occur and that he would be on the verge of exploding or imploding again, which would have jeopardized the work of the ICRC, his life, and that of his colleagues.
What happened to that person? Nothing was done to help her, since PTSD was not well known at the time. She probably blamed herself for not being able to cope and for disgracing the colours of the national Red Cross Society that had recruited her. A harsh reality! But was there any other solution than to leave? Should I run the risk of this person losing their composure even more and putting everyone else at risk? Wasn't it better to move her to a more reassuring environment, hoping that this would help her recover? The choice was simple, in theory, but every time I had to make it, I suffered from "putting the person in question at Geneva's disposal".
The prosthetic centre was located in Peshawar, Pakistan, and housed about 20 amputees waiting for their turn. The philosophy of the centre's management was that basic equipment had to be available in the country, otherwise it would be impossible to repair sophisticated prostheses imported from the West. To do so, they would have to be sent back to Europe, which was unthinkable. It was therefore necessary to locally manufacture rudimentary but robust prostheses, adapted to the mountainous terrain of Afghanistan.
ICRC technicians were doing this, and they were at the same time training Afghans to do the job. Physiotherapists took charge of the patients to teach them how to move with their prostheses. The injured spent a month at the centre and then returned to their villages. I felt a certain satisfaction in going to this centre because I felt that something good was being done for the wounded we had operated on. As for the Afghans, they seemed to accept their fate, grateful to us for the care they were receiving, and happy to be alive and walking again, happy that we were helping them to live despite their disability. Some wanted to return to their villages and fight again, others wanted to stay at the centre as long as possible.
As a surgeon who had performed many amputations, I could not help but feel a certain uneasiness and guilt. I hid what I was feeling with a detached air. I was clowning around and joking about the events we were going through every day. I was the coordinator of the surgical teams, all the expatriate paramedics and local staff working in the hospitals, and it was my duty to set the mood to help people cope and work steadily under difficult conditions. It was important that the seriousness of our work not overwhelm us, so I was a bit cynical. An outside observer might have thought that nothing affected me.
Daniel Dufour, M.D. - "I almost lost my soul": pages 105 to 111.
[1] ICRC: International Committee of the Red Cross
[2] PTSD: Post-Traumatic Stress Disorder
CoCreate Humanity rend hommage au formidable Dr. Daniel Dufour qui nous a quitté le 30 avril 2021. Merci pour le soutien que tu as manifesté dès nos premiers échanges, merci pour ton franc-parler, ton humour et ta confiance, et merci d'avoir participé à la réalisation de notre vidéo de présentation. Nous garderons à jamais les mots que tu as prononcé en ce mois de décembre 2019 : "J'aime ce qui est fou. Ce que vous faites est tellement fou que c'est pour ça que je vous soutiendrai !".
A jamais dans nos pensées et dans nos coeurs. On t'aime fort 💜
Credit photo : David Tesinsky
Nous remercions Cécile Dufour de nous avoir autorisé à publier un extrait du livre du Dr. Daniel Dufour dans le cadre de notre projet Humani-Story. Le Dr. Dufour a été chirurgien de guerre et coordinateur médical pour le CICR. Créateur de la méthode OGE "à l'envers de l'égo", il a exercé une médecine globale qui traite autant les causes que les symptômes de la maladie, et il a accompagné des victimes du TSPT dès 1987.
Webinaire du Dr. Daniel Dufour pour CoCreate Humanity sur le PTSD du 17 septembre 2020
Comments